CINTEGABELLE (31) – Califour et Rego Loungo

Les fouilles menées sur la commune de Cintegabelle, à environ 35 km au sud de Toulouse (Occitanie), au lieu-dit « Califour et Rego Loungo », ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité d’Alexis Corrochano. Elles interviennent dans le cadre du projet de construction du futur collège de la commune, porté par le Conseil départemental de la Haute-Garonne. Pendant six mois, une équipe d’Éveha a ainsi découvert, fouillé et enregistré plus de 650 vestiges archéologiques sur une surface de 1,3 ha, à quelques centaines de mètres de l’Ariège, au sud-ouest du centre villageois de Cintegabelle.

La majeure partie des vestiges correspond des sépultures à inhumation et à des fosses de type silo-dépotoir, ces deux domaines constituaient d’ailleurs les objectifs principaux de la prescription archéologique établie par le Service régional de l’archéologie d’Occitanie (DRAC/SRA).

D’autres vestiges ont également été découverts. Ils permettent, à l’issue de l’opération sur le terrain, de proposer un premier phasage des occupations du site. Celles-ci se répartissent pour le moment en trois étapes principales.

L’occupation antique

À la fin de l’Antiquité, le secteur appartient probablement à un domaine rural de type villa : un établissement gallo-romain ayant été reconnu dans les années 1960-1970 à quelques centaines de mètres au nord-ouest seulement, au lieu-dit « Ville ». Sur le site, les vestiges de cette période sont peu nombreux mais très éloquents. Un trésor monétaire déposé dans une amphore a été découvert dans un état d’arasement très avancé : 200 monnaies ont cependant pu être découvertes, une première estimation (à confirmer par l’étude à suivre) permet d’envisager au plus tôt le milieu du IIIe siècle pour la période d’enfouissement du dépôt. La découverte d’un bâtiment de plan carré, construit en terre cuites architecturales et galets maçonnés, constitue un autre point fort de la fouille : il s’agit d’un mausolée de la fin de l’Antiquité doté d’un hypogée. Cet espace souterrain, destiné à abriter la sépulture ou les restes d’une famille de riches propriétaires (probablement ceux de la villa), n’a pas livré de mobilier. Il avait été entièrement vidé puis comblé par de puissants apports sédimentaires sur toute sa hauteur conservée. Il était voûté, entièrement enduit et son sol était aménagé en mortier de tuileau. Une porte souterraine entièrement dégagée dans le mur sud, devait permettre d’y accéder en donnant directement sur un élément mis en valeur contre le mur opposé. À cet endroit, deux pilettes espacées d’environ 1,50 m devaient supporter à l’origine une table ou un sarcophage.

L’occupation du haut Moyen Âge

C’est au premier Moyen Âge que le secteur semble intensément occupé : les découvertes se multiplient sur le site. Dans les comblements supérieurs d’abandon du mausolée antique, plusieurs sépultures ont été découvertes et étudiées. Certaines d’entre elles ont livré des accessoires vestimentaires métalliques qui permettent de les dater des VIe-VIIe siècles. Ces tombes appartiennent en réalité à une vaste nécropole qui s’est développée entre le VIIe et le Xe siècle environ : plus de 400 sépultures, généralement orientées avec la tête vers l’ouest, ont pu être identifiées et fouillées. Il s’agit la plupart du temps de tombes en fosse simple mais les observations taphonomiques et archéo-anthropologiques ont permis de déceler la présence de nombreux aménagements en bois et parfois d’enveloppes textiles ou en cuir (linceul, chausses, etc.). Quelques tombes étaient mieux aménagées : elles sont dotées d’une architecture composée de galets et de fragments de TCA pour les parois et le fond, qui proviennent peut-être de la démolition du mausolée (ou de ses ruines). L’étude biologique, couplée à des analyses de laboratoire, devrait permettre de définir le profil de cette population rurale du haut Moyen Âge.

L’occupation du Moyen Âge

Au Moyen Âge central, on n’observe plus de sépultures sur le site, à l’exception de quelques inhumations dispersées ou en marge et qui participent du nouveau mode d’occupation du secteur à cette époque. Dès lors, le site est en effet essentiellement occupé par de nombreuses fosses circulaires dont une grande partie correspond des silos souterrains désaffectés, par des fours enterrés, un réseau de fossés curvilignes et quelques trous de poteau. S’il n’est pas permis d’identifier un habitat aggloméré de type villageois, les vestiges découverts indiquent un milieu rural, à vocation agricole (ou pour la stockage des denrées) et probablement situé à proximité de l’habitat contemporain. La découverte de nombreux fours culinaires et l’étude des comblements anthropiques des silos permettront de renseigner les pratiques agricoles et de consommation de cette population au milieu du Moyen Âge.

Passée cette époque, on n’observe plus aucun vestige archéologique notable sur l’emprise de la fouille, la mise en culture et les labours, probablement assez intense au cours des derniers siècles, semblent avoir ôté tout indice du devenir du site après le XIIe siècle environ : sa vocation agricole aux époques moderne et contemporaine est très probable. Le village actuel, situé à quelques centaines de mètres au nord-est, est mentionné à partir du Moyen Âge central. Il a fait office de place forte en devant une châtellenie royale quelques générations plus tard. À l’issue de la fouille, les mobiliers, les sédiments et les ossements ont été prélevés pour traitement, analyse et conditionnement. Les études des spécialistes (céramologie, archéozoologie, petit mobilier, analyses paléoenvironnementales, datations 14C, etc.) ainsi que des données récoltées se poursuivent actuellement et permettront d’affiner nos connaissances de ce site et de ses occupations.

Dates d’intervention : 1 avril – 27 septembre 2019

Période(s) étudiée(s) : Antiquité, Premier Moyen Âge ; Second Moyen Âge

Nature des vestiges : Nécropole, habitat rural, silos, fours, fossés, dépôt monétaire, mausolée