Les fouilles archéologiques menées sur le site de Moislains (80) – Secteur 3 – S3-T016 – MS5 du lot 3 de l’AC du Canal Seine Nord Europe (Secteur 3 – Site 8 – Fouille H) ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité d’Anaïs Berrier dans le cadre du projet d’aménagement porté par la Société du Canal Seine Nord Europe.
Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour des vestiges datés du Haut Moyen Âge.
Les objectifs scientifiques de la fouille
Le diagnostic réalisé sur l’emprise prescrite avait mis en évidence une occupation rurale alto-médiévale, vraisemblablement agro-pastorale, dont le développement semblait circonscrit dans sa partie occidentale par la rivière La Tortille. Les vestiges paraissaient s’organiser au sein d’un espace clos et cohérent, d’un point de vue spatial et chronologique. Les principaux objectifs de la fouille étaient, outre la documentation, la caractérisation et le phasage des différentes occupations, l’intégration du site dans son environnement naturel. Il devait également s’agir d’enregistrer l’organisation spatiale et l’utilisation de toutes les structures en fonction de l’évolution de ce terroir.
Les vestiges d’un habitat du haut Moyen Âge
Sur les 1432 structures recensées au cours de la fouille, on dénombre notamment 800 trous de poteau, 53 fonds de cabane, 17 structures de combustion et 17 sépultures, de nombreux silos et des vestiges liées à la Première Guerre mondiale. La faible quantité de mobilier archéologique découverte est une caractéristique typique des habitats alto-médiévaux de notre région.
Les premières observations de terrain indiquent que cet habitat s’est probablement installé au 4e siècle, a perduré jusqu’au 9e siècle, avant de connaître un long déclin s’étendant jusqu’au 12e siècle.


Les fonds de cabane médiévaux
Les fouilles ont révélé une cinquantaine de fonds de cabane, dont l’organisation spatiale est marquée par deux orientations prédominantes : un ensemble orienté nord-sud et un autre est-ouest. La présence de céramiques dans ces structures sera cruciale pour affiner leur datation. La typologie des fonds de cabane observée est variée, incluant des fonds de cabane sans poteau, avec quatre poteaux corniers, avec quatre poteaux corniers et deux poteaux axiaux, avec deux poteaux axiaux, et enfin avec six poteaux externes. Ces fonds de cabane ne présentent aucun aménagement interne apparent.

Des fours domestiques médiévaux
Les fours ont tous été entièrement fouillés. Ils montrent des caractéristiques classiques pour la période, étant tous de plan piriforme et composés d’une sole, d’une chambre de chauffe, et parfois d’une coupole. Il s’agit de fours domestiques, certains étant organisés en batterie, près de la rivière la Tortille. Ces découvertes apportent des informations cruciales sur l’organisation de l’occupation rurale et la chronologie du site. La proximité des fours avec la Tortille aide à comprendre les stratégies d’implantation, les techniques utilisées, et les contraintes environnementales de l’époque. Des prélèvements ont été effectués sur les soles de quatre fours pour des analyses de datation par archéomagnétisme, ce qui permettra de préciser leur chronologie.
Les traces d’artisanat de la forge, de l’élevage et de l’agriculture
Le mobilier archéologique découvert fournit des informations sur les activités menées directement sur place. La présence de mobilier scoriacé trahit clairement une activité de forgeage sur le site ou à proximité. Les premières observations sur la faune révèlent de nombreux restes de « cinquième quartier » et de découpes primaires sur les ossements, ce qui suggère que certaines espèces animales étaient élevées et consommées directement sur place. De plus, l’observation de nombreuses graines dans les silos et les fragments de meules indiquent que la transformation alimentaire pouvait également s’y dérouler.
Les restes funéraires d’adultes et d’enfants
Des sépultures ont été découvertes au sein du site. La première est localisée au sud-ouest, près de la Tortille. Les autres se situent au nord-est du site, à proximité de la berme est.
Il s’agit d’individus adultes et d’immatures âgés de 4 à 6 ans. Aucun mobilier archéologique n’a été retrouvé en association avec ces inhumations. Des analyses complémentaires seront nécessaires pour fournir des informations précises concernant leur datation.

La Première Guerre Mondiale
Le site archéologique présente également des vestiges importants de la Première Guerre mondiale. Nous y avons recensé diverses structures incluant deux voies ferrées, plusieurs réseaux de tranchées et des boyaux de communication. Cette localisation, à l’arrière des lignes de front, a eu un impact direct sur les structures archéologiques médiévales, complexifiant ainsi la lecture du site.
L’objectif principal de la post-fouille est d’approfondir notre compréhension de l’occupation rurale du Haut Moyen Âge et de son interaction dynamique avec l’environnement immédiat, notamment la rivière la Tortille.

Les objectifs de la post-fouille
cela, le projet vise à étudier l’évolution du site en caractérisant ses aménagements archéologiques et en déterminant leur chronologie.
Nous nous attacherons également à étudier la nature et la fonction des structures archéologiques découvertes. Un autre objectif essentiel est d’analyser et de comprendre les diverses occupations présentes sur le site – qu’il s’agisse d’habitat, d’activités artisanales ou de vestiges funéraires – afin d’établir leur chronologie et leur structuration spatiale.
Par ailleurs, l’évaluation d’une potentielle activité métallurgique et l’analyse des éventuels vestiges funéraires constituent des axes majeurs de cette recherche.
De plus, l’étude déterminera la nature et la fonction des fours présents sur le site et à analyser les modes de productions.
Enfin, le projet ambitionne de reconstituer le paléoenvironnement de ces occupations humaines et de mettre en perspective nos découvertes en les comparant avec d’autres opérations archéologiques similaires menées dans la région.
Cette approche globale nous permettra d’acquérir une compréhension de la façon dont les communautés du Haut Moyen Âge vivaient, s’adaptaient à leur environnement et menaient leurs diverses activités dans ce contexte rural spécifique.