Le suivi archéologique de travaux mené sur le site de Nantes (44) – Rue Élie Delaunay a été réalisé par le bureau d’études Éveha, sous la responsabilité de Paul Lagarrigue, dans le cadre du projet d’aménagement porté par ERENA. Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour des vestiges datés de l’Antiquité, du Moyen Âge et des époques moderne et contemporaine.
Les objectifs de cette étude
Les interventions archéologiques réalisées dans ces faubourgs orientaux de Nantes restent rares, toutes périodes historiques confondues, et se résument principalement à trois diagnostics archéologiques réalisés à proximité de l’emprise de fouille. Couplé à une étude documentaire et historique, ce suivi des travaux d’implantation du réseau de chaleur, avait donc pour objectif principal de combler les lacunes archéologiques dans ce secteur péri-urbain. Il devait permettre d’appréhender, de manière diachronique, la nature et l’extension des occupations anciennes dans ce secteur de la ville marqué par les pôles de pouvoirs laïcs et religieux et les axes de communication.
Le suivi de travaux devait étudier les conditions initiales d’implantation du site, sa taphonomie et les vestiges mis au jour. L’opération avait pour objectif de percevoir les unités fonctionnelles en précisant leur contexte chrono-culturel. Le statut économique des occupations devait être précisé au travers de l’étude de mobilier. L’environnement dans lequel les occupations se sont installées a donc été intégré aux études. La limitation de la côte de travaux à 1 m a permis de concentrer les attentes sur les périodes les plus récentes et les résultats, de compléter les données sur l’implantation et la structuration urbaine de la ville de Nantes depuis l’Antiquité. Les datations sont proposées avant l’étude du mobilier prélevé par les spécialistes qui permettra de les affiner.
Un fossé antique ?
Il en ressort un fossé perçu en coupe dans le sud de l’emprise, qui semble, peu ou prou, parallèle au parcellaire actuel, et qui a livré deux tessons dont l’un d’entre eux a été reconnu comme datant des 1er ou 2e siècles.

Fig. 1 : Vue en coupe du fossé antique perturbé par de nombreux réseaux. Crédit : Éveha, 2025.
Une possible mare médiévale ?
Au nord de l’emprise, dans la rue Gambetta, une vaste structure en creux a été mise au jour à l’angle de la zone de recherche des réseaux. Il s’agit probablement d’une mare qui semble alimentée par un fossé (un exutoire) apparu dans la coupe à l’est. Cette mare est caractérisée par d’importantes couches hydromorphes bleu intense et très plastiques. Elle a livré du mobilier médiéval dans ces couches les plus basses.

Fig. 2 : Vue en coupe de la mare contenant du mobilier médiéval. Crédit : Éveha, 2025.
Des vestiges des aménagements contemporains
Dans le nord de la rue Élie Delaunay, un puits a pu être appréhendé. Il est reconnu sur un plan de 1803, et est alors situé dans le jardin du couvent de la Visitation.
Légèrement plus au sud, une canalisation et un mur déstructuré ont été découverts.
La canalisation n’est pas datable, et n’est plus en eau. Le mur, par contre, correspond au tracé de la limite du jardin du couvent de la Visitation. Il doit correspondance aux résidus de la destruction du mur de clôture avant le percement de la rue Delaunay.

Fig. 3 : Vestiges d’un des puits visible sur les plans de la fin du 18e siècle. Crédit : Éveha, 2025.
Les vestiges les plus récents correspondent à des rejets de déconstruction, livrant un matériel des 18e s et 19e s., dont de la céramique et un fragment de plaque de marbre.
Ces vastes couches s’étendent dans le sud de la rue, là où rien n’est matérialisé sur le cadastre de 1834. De même, un fragment de mur découvert dans l’angle nord de la fouille, dans la rue Gambetta, n’a pas pu, pour l’instant, être reconnu sur les plans anciens.

Fig. 4 : Canalisation installée le long de la clôture du jardin du couvent de la Visitation. Crédit : Éveha, 2025.
Enfin, une vaste couche de tuffeau, réduit en poudre puis compacté, pourrait être le reliquat des travaux de construction du musée des Beaux-Arts, dont ce matériau est principalement utilisé en façade.

Les recherches à venir
À la suite de ces différentes découvertes au cours de l’opération, la phase de post-fouille s’attache actuellement à les qualifier et les contextualiser dans le cadre archéologique et historique de ce secteur de la ville de Nantes. Ainsi, les vestiges antiques devront, a minima, être mis en relation avec les occupations contemporaines les plus proches. Il en est de même pour la période médiévale. Considérant que les autres vestiges recoupent les tracés de plan du 18e s. et 19e s., il est également nécessaire de les mettre en relation avec les bâtiments encore existants. De tous ces éléments, ressort la question de l’évolution d’un secteur de la ville de Nantes de l’Antiquité à l’époque actuelle.