Neyron (01) – Les Sarrasinières

Soutenue par Éveha et le Ministère de la Culture, une seconde campagne de fouilles sur le site des Sarrasinières à Neyron (Ain) s’est déroulée du 21 au 29 juin sous la direction de Tony Silvino, archéologue spécialiste de l’Antiquité gallo-romaine dans la région lyonnaise.

Cet ouvrage monumental reconnu depuis le XVIIe siècle sur les berges du Rhône n’avait jusqu’à récemment fait l’objet d’aucune étude archéologique proprement dite. Ce n’est que depuis 2018 que différents chercheurs s’associent pour mieux comprendre cet ouvrage énigmatique qui serait en lien avec les réseaux souterrains de Lyon que l’on appelle communément « arêtes de poisson ». À partir de cette année, cette collaboration prend la forme d’un Projet Collectif de Recherche (PCR) dirigé par Cyrille Ducourthial (Service Archéologique de la Ville de Lyon).

Vestiges de la façade d’une vaste salle souterraine ouverte sur le Rhône. Crédit : Éveha, 2019.

L’ouvrage des Sarrasinières désigne un système de galeries observé sur la rive droite du Rhône depuis Lyon jusqu’au moins la commune de Neyron dans l’Ain. Des aménagements connexes lui sont associés. Certaines portions du monument sont encore en partie apparentes sur les berges envahies par la végétation, et Éveha intervient depuis 2019 sur deux d’entre elles à hauteur de la commune de Neyron. La première portion correspond à une vaste salle souterraine voûtée ouverte sur le Rhône. À quelques centaines de mètres en aval, le second secteur investi correspond à une galerie dont seuls un piédroit et une partie de la voûte ont été préservés. Lors des précédentes opérations, la récolte de résidus de charbons de bois pris dans le mortier de la construction et datés par le radiocarbone a permis de confirmer l’attribution de l’ouvrage à la période antique, qui pourrait avoir été édifié entre la fin du Ier s. av. J.-C. et le début du Ier s. ap. J.-C..

Premier dégagement des vestiges en 2019. Crédit : Éveha, 2019.
Vue du sondage réalisé cette année contre le piédroit conservé d’une portion de galerie. Crédit : Éveha, 2021.

Plusieurs sondages réalisés cette année pour certains avec des moyens mécaniques apportent de nouvelles données sur l’édifice. Ainsi ses fondations ont pu être atteintes et documentées. Un enregistrement précis des dépôts de crue postérieurs à l’abandon a été réalisé par ailleurs. Des dépôts semblables mais peut-être antérieurs à la fondation de l’ouvrage ont aussi pu être appréhendés. Ces derniers ont livré quelques fragments de céramique antique. Surtout, du bois ayant notamment servi au coffrage des fondations en béton du monument et conservé jusqu’à nos jours dans un milieu humide, a été récolté. L’état de conservation de ce bois sera peut-être suffisant pour obtenir une datation dendrochronologique qui sera un peu plus précise que la méthode par le radiocarbone précédemment utilisée. Parmi les autres résultats de l’opération, l’observation attentive des pierres employées dans la construction par un géologue confirme que le matériau utilisé pour la mise en œuvre des Sarrasinières (calcaire rouge à entroques du val de Saône) est identique à celui des souterrains lyonnais, ce qui étaie le lien supposé entre les deux ouvrages.

Côté Rhône, les fondations de la galerie (ici photographiées en plan au fond du sondage) se sont disloquées avec l’érosion de la berge. Crédit : Éveha, 2021.
Vue de la stratigraphie des dépôts de crue recouvrant les vestiges des fondations de la galerie. Crédit : Éveha, 2021.
Dégagement d’une planche de bois ayant servi au coffrage des fondations en béton de la galerie. Crédit : Éveha, 2021.

L’étude de ces nouvelles données acquises sur l’édifice nous permettra sans doute d’en connaître un peu plus sur ce monument qui pourrait bien présenter les caractéristiques d’un aménagement portuaire relié à Lyon par un système de galeries (entre autres pistes d’interprétation).