SAINT-BONNET-LE-CHÂTEAU (42) – centre-ville

Un suivi de travaux archéologique a été mené au courant de l’année 2021 à Saint-Bonnet-le-Château (42), dans le cadre de la réhabilitation du réseau d’assainissement et d’eau potable de la ville (Loire Forez Agglomération). L’opération, réalisée par la société Éveha, s’est déroulée en deux phases : du 26 mai au 13 juillet et du 6 septembre au 5 novembre 2021, et a mobilisé deux archéologues.

Saint-Bonnet-le-Château est situé à quarante kilomètres à l’ouest de Saint-Étienne, dans le département de la Loire. Implantée sur une excroissance rocheuse granitique, la ville est localisée en plein cœur des monts du Forez.

Vue aérienne de la ville de Saint-Bonnet-le-Château. Crédit : J. Moquel et J. Saadi, 2021.

Les tranchées de travaux concernées par la prescription se situent au sein du bourg médiéval. Dans le cadre de la prescription, il importait de collecter des données sur le fossé défensif et de documenter une partie de la ville médiévale encore peu investiguée à ce jour. Il s’agissait également de porter une attention particulière aux traces d’activités artisanales localisées dans ce secteur de la ville.

Les premiers résultats mettent en évidence un pan de l’occupation médiévale intra (rue Dessous de Remparts et rue des Serruriers) et extra-muros (place du Grand Faubourg et place de la République), et apportent un éclairage succinct sur la partie occidentale de la ville. Les investigations, bien que limitées par l’impact des travaux d’assainissement, se sont concentrées sur trois secteurs distincts.

Vignette de l’Armorial de Guillaume Revel. Crédit : Bibliothèque Nationale, fr. 22297, p. 471.

Rue Dessous des Remparts et rue des Serruriers

Le premier secteur est situé à l’intérieur des remparts, dans la rue Dessous des Remparts et la rue des Serruriers. L’implantation des sondages, bien que prometteuse dans ce quartier à caractère artisanal, s’est révélée quelque peu décevante.

L’étude documentaire préalable et les nombreux travaux déjà réalisés sur le bourg médiéval de Saint-Bonnet-le-Château permettent de comprendre l’évolution et la topographie architecturale de la ville. Au XVIe siècle, la bourgeoisie marchande prospère et affiche son opulence au travers de riches demeures dont certaines subsistent encore dans la ville (Hôtel Vilnoz, maison du patrimoine…). L’artisanat très florissant dans la cité est notamment décrit dans le terrier comtal de 1415 conservé aux archives départementales (cote B 2061). On y trouve la mention de nombreux quartiers comme celui des cordonniers « in sabbateria vercherie » ou encore le quartier des tisserands, des tanneurs et des serruriers.

Ces quartiers artisanaux semblent se développer à l’ouest de la ville, au niveau de la rue Dessous des Remparts et de la rue des Serruriers. Bien que les sources documentaires attestent d’une activité artisanale dans ce secteur de la ville, les investigations n’ont pas permis de conforter ces données. En effet, la profondeur des tranchées d’aménagement et les nombreux réseaux préexistants ont limité les observations archéologiques. Les données recensées mettent au jour quelques fosses et un niveau de remblai de la période médiévale ou moderne. Le terrain naturel a été atteint assez rapidement (à 0,70 m) sous l’enrobé ou le sol pavé. La présence d’une structure en creux de type fossé a tout de même été documentée à la fin de la première phase de travaux (mai à juillet 2021).

Place du Grand Faubourg

Le second secteur est localisé à l’extérieur des remparts et a permis d’appréhender le quartier du faubourg (Place du Grand Faubourg). Une large fenêtre de 221 m² et des tranchées complémentaires ont révélé les vestiges d’une activité artisanale probablement dévolue au travail du métal, illustrée notamment par une structure de combustion associée à des rejets d’activité métallurgique en alliage cuivreux. Cette structure cohabite avec une série de fosses de rejet dont les comblements sont composés d’éléments détritiques (scories, charbons…). On retrouve également de nombreux trous de poteau et des fossés traversant l’emprise, le plus souvent selon un axe ouest-est.

Vue aérienne de la fenêtre ouverte sur la place du Grand Faubourg. Crédit : J. Moquel et J. Saadi, Éveha 2021.

Place de la République

Un grand fossé défensif a été partiellement sondé dans le troisième secteur localisé sur la place de la République. La profondeur des tranchées des travaux d’assainissement étant réduite, le profil du fossé n’a pas été entièrement observé, mais quatre sondages perpendiculaires ont été réalisés le long de son tracé. Deux coupes en particulier, pratiquées de part et d’autre du fossé dans des sondages distincts, permettent d’effectuer des observations sur la stratigraphie interne du fossé.

Coupes est-ouest du fossé défensif. Crédit : J. Saadi, Éveha 2021.

Si les tranchées des travaux ne sont pas suffisamment profondes pour atteindre le fond du fossé, des carottages réalisés à l’aide d’une tarière évaluent que sa profondeur dépasse les 5,20 m depuis le niveau du sol actuel. Ces colonnes sédimentaires ont un double avantage, puisqu’elles offrent l’opportunité d’effectuer des prélèvements dans les différentes couches du comblement. Ils sont susceptibles de nous renseigner sur l’environnement du site par le biais notamment d’analyses palynologiques (étude des pollens conservés dans les dépôts sédimentaires) ou paléoparasitologiques.

Des artefacts ont aussi été ramassés au cours des investigations mécanisées, notamment des objets en cuir qui peuvent être attribués à la toute fin du Moyen Âge et au début de l’Époque moderne (XVe-XVIIe siècles). Ces objets ont été stabilisés au Centre de Conservation et de Restauration du Cuir (2CRC) basé à Moirans, en Isère.

Deux semelles premières : semelles de propreté pour des chaussures d’enfant (artefacts découverts dans le comblement inférieur du fossé défensif). Crédit : J. Saadi, Éveha 2021.

L’autre point remarquable de ce secteur est l’identification d’un ensemble de maçonneries. Elles doivent certainement être rapprochées des éléments de fortification de la porte Verchères, qui s’ouvrait sur le quartier du faubourg et faisait partie des entrées principales de la ville.

Probables vestiges des maçonneries de la porte Verchères. Crédit : J. Saadi, Éveha 2021.

La cité urbaine de Saint-Bonnet-le-Château était dotée d’une enceinte quadrangulaire, représentée dans l’Armorial de Guillaume Revel (voir plus haut). Aujourd’hui, son tracé est toujours identifiable dans la topographie urbaine de la ville. Ces éléments de fortification sont à mettre en relation avec la mise en défense progressive des villes qui intervient à la fin du XIIIe siècle et au cours du XIVe siècle.

La porte Châtelaine de St-Bonnet-le-Château (antérieure au XVe siècle). Crédit : J. Saadi, Éveha 2021.