La fouille exceptionnelle d’un camp romain à Villeneuve-sur-Lot (47)

La fouille en cours, menée sous la direction de Pierre Dumas-Lattaque en amont des travaux d’aménagement d’une maison individuelle, a permis de mettre au jour le cœur du camp romain.

Le camp militaire d’Excisum : une hypothèse ancienne


Y avait-il bien un camp romain à Eysses, sur la commune de Villeneuve-sur-Lot (47) ? Cette hypothèse ancienne s’appuyait sur la découverte, aux XVIIe et XVIIIe s., de stèles funéraires mentionnant des cohortes auxilliaires et sur la fouille plus récente d’un dépotoir de mobilier militaire antique au nord de la fouille actuelle, sans parler des vestiges connus en périphérie grâce aux fouilles programmées. Mais jusqu’alors, rien ne permettait d’identifier l’emplacement du camp avec certitude.

La fouille d’un camp militaire romain du Ier s. ap. J.-C.


Le site s’organise autour d’une voie nord-sud (cardo) qui vient croiser une voie est-ouest (decumanus). Le cardo s’interrompt au nord en raison de la présence d’un vaste bâtiment à l’entrée monumentalisée : il s’agit du principia du camp, c’est-à-dire le bâtiment de l’état-major. Au sud, de part et d’autre de ce cardo, deux bâtiments au plan identique ont été fouillés. Ils se composent de séries de casernements dont les pièces, toutes identiques (6 x 3 m), correspondent aux chambres des soldats. Ces casernements s’organisent autour de cours intérieures assurant la desserte des cellules.

Cette organisation correspond au dernier état d’occupation du camp, daté entre 50 et 80 de notre ère. Le camp d’Excisum pourrait ainsi être un des plus anciens exemples connus en France de camp construit en pierre.

Deux états antérieurs, datés entre 0 et 50 de notre ère, ont été mis en évidence. Ainsi, la première installation était aménagée sur des bâtiments sur poteaux de bois. Rapidement, le camp fut ensuite rebâti avec des édifices en terre et en bois sur radier de galets. Sans doute cela marquait-il la volonté d’implanter les unités dans la durée ?
Quoi qu’il en soit, la fouille de ce camp comportant au moins trois phases de construction constitue une découverte exceptionnelle pour étudier l’évolution de ce type d’aménagement dans le temps !

Des vestiges de la vie quotidienne

Dans les bâtiments du camp, différents vestiges témoignent de l’organisation de la vie quotidienne des soldats. Ainsi, les plaques foyères, découvertes dans les casernements, servaient à faire les repas et chauffer la pièce. Des puits permettaient l’accès à l’eau au quotidien, tandis que les caniveaux canalisaient les eaux pluviales et usées vers l’égout et garantissaient ainsi la salubrité du site. De nombreuses fosses-dépotoirs, recueillant les déchets, ont également livré un mobilier abondant. Enfin, d’autres découvertes témoignent d’un petit artisanat des alliages cuivreux, indispensable pour réaliser des réparations sur les armes et les objets : les unités romaines se devaient en effet d’être autonomes.

Le mobilier

Un important mobilier est exhumé des fouilles. Il s’agit, pour une majeure partie, de céramiques dont une quantité importante de sigillées et d’amphores, pour certaines importées d’Afrique.
Un important corpus de monnaies et d’autres objets liés au domaine militaire et notamment à la cavalerie (phalère, harnachement, etc.) a également été découvert. Ce mobilier est complété par toute une série d’objets associés à la vie quotidienne de la caserne comme des fragments de vases en verre, des jetons, des perles…

La fouille doit s’achever à la fin du mois d’avril 2023.