SAINT-OUEN-L’AUMÔNE (95) – ZAC de Liesse II

Les fouilles menées sur le site de la « ZAC de Liesse II » à Saint-Ouen-l’Aumône (95) ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité d’Aurélie Laurey. Elles interviennent dans le cadre du projet d’aménagement d’un nouveau quartier d’habitation et d’activités par Cergy-Pontoise Aménagement. Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour une voie antique et une zone de culture de la vigne de l’Époque moderne.

À la suite de la première phase d’un diagnostic réalisé sur 8,25 hectares par l’Inrap en 2015, le service régional de l’Archéologie d’Île-de-France a prescrit une fouille archéologique d’une surface totale de 8000 m². Celle-ci était divisée en deux secteurs : le premier concernait l’étude d’une voirie antique sur 3000 m², le second portait sur l’analyse d’une zone de culture de la vigne de l’Époque moderne sur 5000 m². L’opération s’est déroulée à l’été 2020, avec une équipe de six archéologues.

La voie antique

Dite « Chaussée Jules César », celle-ci reliait Paris à Lillebonne sur la Manche en passant par Pontoise et Rouen. Son tracé est encore fréquemment marqué et visible dans le paysage, et son itinéraire a souvent été repris par des axes viaires jusqu’à nos jours. À l’ouest de l’Oise, elle a fait l’objet de quelques interventions archéologiques depuis la fin des années 1990, notamment menées par l’Afan puis l’Inrap, et le Sdavo. Cette opération constitue une opportunité rare d’étudier cette voie sur un tronçon aussi long et aussi bien conservé, et ce dans un territoire, entre Paris et Pontoise, où elle est habituellement oblitérée par la voirie actuelle.

Vue aérienne de la voie antique en fin d’opération. Crédit : Flying Movie, 2020.

Elle a ainsi été fouillée sur environ 75 m de long. Trois sondages transversaux, deux zones de fouille en paliers et un dégagement en plan sur l’un des niveaux de circulation ont été préparés à la pelle mécanique. L’enregistrement stratigraphique des coupes de référence a permis d’établir la succession des différents états composant la voie, que la fouille manuelle en paliers a enrichi et confirmé, tout comme le dégagement fin du premier niveau de circulation antique supposé.

Vue de la fouille en paliers de la voie (zone ouest) en fin d’opération. Crédit : Éveha, 2020.

L’emprise totale de la voie, entre ses deux fossés-limites, couvre une largeur d’environ 23 m. Les fossés-limites sont distants d’environ 8 m des pierres de contention de la chaussée, dont la bande de roulement et les bas-côtés mesurent respectivement environ 4 m et 1 m de large. Elle apparaît avoir été construite de manière très homogène sur l’ensemble du tracé qui nous occupe. Les niveaux de circulation antiques consistent en une succession de couches de calcaire local (pierres brutes disposées en radier, concassées, damées en un sable fin). Le soubassement de la voie, façonné selon un profil bombé, permettait de gérer l’évacuation de l’eau, qui dès lors ne nécessitait pas le creusement de fossés bordiers. Un niveau de circulation en sable jaune induré et lité, antérieur aux niveaux antiques, pourrait être lié à la phase de chantier et consister en une couche de propreté, préalable et nécessaire à la réalisation du gros œuvre.

Les états ultérieurs (médiévaux, modernes et contemporains) de la voie, devenue chemin rural, sont quant à eux faits de recharges de limon et/ou de cailloutis, et semblent en revanche posséder des fossés bordiers ayant entamé les niveaux antérieurs.

Vue en coupe de la voie. Crédit : Éveha, 2020.

Actuellement en cours, les études de mobilier et les datations radiocarbone devraient permettre de préciser la datation des différents états, notamment les plus anciens, de la « Chaussée Jules César ». L’étude des matériaux et des prélèvements micromorphologiques effectués dans ses différents niveaux pourraient confirmer l’analyse de son mode de construction, en lien avec son environnement topographique et géologique.

La culture de vigne moderne

Cette zone de culture se présente sous la forme de près d’une quarantaine de fossés majoritairement orientés nord-est/sud-ouest, possédant de part et d’autre des fosses de plantation attenantes (jusqu’à 120 au maximum), conservés de manière inégale.

Vue aérienne de la zone de culture de la vigne en début d’opération. Crédit : Flying Movie, 2020.

Le très grand nombre de structures évalué a conduit à centrer et échantillonner la fouille de ces structures sur des secteurs-tests.

Vue en plan d’un secteur-test de fosses de plantation avant fouille. Crédit : Éveha, 2020.

Les tranchées de plantation mesurent entre 30 et 50 cm de large pour une dizaine de centimètres de profondeur au maximum. Les fosses sont quant à elles de plan quadrangulaire, d’environ 50 cm de long pour 40 cm de large et 10 cm de profondeur au maximum. Leur profil sont similaires, avec des parois verticales et un fond plat, et leur comblement identique, souvent fait de limon brun.

Vue d’un secteur-test de fosses de plantation après fouille. Crédit : Éveha, 2020.

La morphologie de ces structures de plantation semble bien confirmer l’identification faite avec une culture de la vigne. Celle-ci sera probablement renforcée par l’étude des prélèvements paléoenvironnementaux et la réalisation d’une étude documentaire, une fois leur datation assurée grâce à l’étude du mobilier récolté et à des datations radiocarbone. Par la suite, les recherches se porteront sur les caractéristiques de cette pratique agricole, qui seront comparées avec d’autres exemples découverts dans la région ou au-delà.