COLOMBES (92) – Église Saint-Pierre Saint Paul – Vieux Clocher

Les fouilles menées sur le site du « Vieux Clocher » à Colombes (92) ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité d’Isabelle Caillot. Elles interviennent dans le cadre du projet de restauration des ruines de l’église Saint-Pierre Saint-Paul. Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour les fondations anciennes de l’édifice de culte roman et une nécropole occupée du haut Moyen Âge à la fin de la période moderne.

De l’église Saint-Pierre Saint-Paul il ne reste aujourd’hui en élévation que la croisée du transept, le clocher et la chapelle nord (fig. 1). Entre 1968 et 1969, des travaux d’élargissement des voiries et le lotissement urbain ont entraîné la suppression de la nef, du bras sud du transept ainsi que la démolition du chœur. Ces destructions et l’important abaissement du niveau de sol avaient alors occasionné la découverte de nombreuses tombes, parmi lesquelles des sarcophages mérovingiens.

Fig. 1 : Le Vieux Clocher – l’église avant l’intervention archéologique. Crédit : Éveha, 2018.

Malgré son envergure modeste (100 m²), la fouille menée en 2018 et 2019 a permis de mettre au jour plus de 200 faits archéologiques, dont 140 sépultures (fig. 2). La puissance stratigraphique, conservée sur un mètre d’épaisseur, a permis d’identifier des niveaux d’inhumations successifs s’échelonnant du haut Moyen Âge à la période moderne. L’indigence du mobilier permettant de dater précisément les sépultures est compensée par les nombreuses relations stratigraphiques entre tombes et maçonneries.

Fig. 2 : Plan masse des vestiges. Crédit : Éveha, 2020.

Les pratiques funéraires au sein de la nécropole

On notera une variété des architectures funéraires : sépultures en coffrage maçonné en plâtre ; tombes construites en pierres calcaires et mortier de chaux, naviformes ou quadrangulaires, éventuellement avec logette céphalique ; enfin, le cercueil cloué, utilisé dès les XIIIe-XIVe siècles, jusqu’à l’interdiction d’inhumer dans les lieux de culte – par une ordonnance royale de Louis XVI datée du 10 mars 1776, avec des exceptions concernant notamment les membres du clergé et les fondateurs de chapelle. Tous les défunts étaient inhumés sur le dos, en vêtements ou en linceul. La plupart des sépultures sont classiquement orientées tête à l’ouest, pieds à l’est, mais cinq individus ont été inhumés pieds à l’ouest et tête à l’est. À partir du XVIIe siècle, les membres du clergé sont inhumés tête à l’est, à l’inverse des laïcs, pour regarder vers l’assemblée des fidèles. Il est donc possible que ces inhumations placées devant l’autel soient celles de religieux, mais aucun autre indice ne vient pour l’heure étayer cette hypothèse. Des adultes des deux sexes ainsi que des enfants ont été identifiés.

L’architecture de l’église romane

Plusieurs fondations appartenant à des phases de construction successives ont été relevées. Les maçonneries les plus anciennes sont situées sur la partie nord de l’église, sous le clocher et dans la chapelle (fig. 3).

La découverte majeure tient au dégagement de puissants murs de 1,20 m de large, profondément ancrés à plus de 3 m sous le niveau du sol actuel. Leur implantation coupe deux sépultures datées par carbone 14 de la fin de la période carolingienne. La datation de deux tombes maçonnées construites contre le parement des fondations permet de caler leur mise en œuvre entre le XIe et le début du XIIsiècle. Des fondations au plan semi-circulaire, présentant les mêmes matériaux (pierre calcaire et mortier de chaux), ont été mises au jour sur l’espace de l’actuelle chapelle à chevet plat. La datation de cette abside n’est pas assurée, la liaison entre les fondations du clocher et les maçonneries de l’ancienne chapelle n’ayant pu être observée. Cette maçonnerie moins fondée est installée dans une tranchée qui coupe nettement des inhumations carolingiennes et des tombes des XIe-XIIsiècles, un indice qui permet d’y voir une seconde phase de travaux.

Fig. 3 : Orthophotographie d’un niveau de fouille sous la croisée du clocher. Crédit : Éveha, 2019.

La faible proportion de sépultures sous le clocher et la chapelle va dans le sens d’une modeste église paroissiale agrandie sur le tard, au début de la période moderne, vers le sud, sur le cimetière médiéval.

Malgré la complexité technique de l’opération, la fouille a permis de mettre en exergue un secteur à vocation funéraire depuis le haut Moyen Âge jusqu’à la fin de l’époque moderne, ainsi que les fondations romanes de l’église Saint-Pierre Saint-Paul.

La poursuite des études de mobilier et de l’analyse stratigraphique permettra sans nul doute d’enrichir les connaissances tant sur l’église que sur la population de Colombes sur près d’un millénaire.