SAINT-VARENT (79) – La Grande Galipe

Les fouilles menées sur le site de « La Grande Galipe » à Saint-Varent (79) ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité d’Antoine David. Elles interviennent dans le cadre de l’extension de la carrière de La Noubleau. Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour un vaste établissement enclos datant de la fin du second âge du Fer.

Le premier enclos

Cet établissement comprend un premier enclos externe curvilinéaire, composé d’un fossé continu qui le délimite à l’ouest et au sud, sur une longueur totale de 165 m (fig. 1 et 2). Dans sa portion occidentale, sa largeur à l’ouverture est de 2,20 m en moyenne pour une profondeur de 1 m. Ses dimensions sont plus réduites dans sa partie méridionale, avec une largeur à l’ouverture de 1,50 m en moyenne pour une profondeur maximale de 0,70 m. Après une large interruption, le tracé de cet enclos se poursuit à l’est où il se compose de trois tronçons de fossés un peu plus puissants (2,50 m de largeur à l’ouverture pour 1,30 m de profondeur), séparés par deux interruptions de 5 à 6 m de largeur. L’une d’elle est affublée d’un système d’entrée matérialisé par deux alignements parallèles de fosses allongées et trous de poteaux qui invitent à restituer une architecture complexe destinée à assurer le contrôle de l’accès à l’intérieur de l’enclos (fig. 3). La lecture stratigraphique des comblements des fossés montre des apports plutôt massifs ; le mobilier y est assez peu présent dans les branches occidentale et méridionale, alors que des concentrations massives de scories (dont de nombreux culots de forge) et de céramiques ont été relevées dans la partie sud-est, autour du système d’entrée. Ce premier enclos délimite un espace d’au moins 1,9 ha, une partie de son tracé étant inconnue au nord.

Fig. 2 : Vue aérienne du site. Crédit : Éveha, 2021.
Fig. 3 : Vue d’ensemble du système d’entrée lié à l’enclos externe. Crédit : Éveha, 2021.

Le second enclos

Un deuxième enclos est implanté dans cet espace interne. De plan trapézoïdal, il enceint une surface de 4 300 m². Les fossés qui le composent sont là encore un peu plus puissants à l’est – jusqu’à 4 m de largeur à l’ouverture pour 2 m de profondeur – que sur les côtés nord, ouest et sud, où ils atteignent au maximum 3,20 m de largeur pour 1,70 m de profondeur. L’accès à cet enclos est matérialisé par une interruption du tracé à peu près au milieu de la branche est, soulignée par deux puissants trous de poteaux situés à un peu plus de 2 m vers l’intérieur. La dynamique de comblement des fossés est assez variable mais globalement cohérente, montrant parfois des stigmates d’entretien voire de reprise du creusement. Plusieurs interruptions du creusement initial ont été relevées, particulièrement dans le tronçon nord de la façade orientale, où elles pourraient être liées à un système de gestion des eaux ; dans cette portion, les comblements initiaux apparaissent particulièrement argileux et hydromorphes, traduisant un phénomène de stagnation d’eau qui ne se retrouve pas par ailleurs (fig. 4). Le mobilier y demeure quantitativement plutôt modeste ; à noter tout de même la découverte de plusieurs grands fragments de meules dans l’angle sud-est de l’enclos, dont un catillus (partie supérieure d’une meule) complet (fig. 5).

Fig. 4 : Coupe du fossé oriental de l’enclos trapézoïdal © Éveha, 2021.
Fig. 5 : Meule (catillus) fragmentaire. Crédit : Éveha, 2021.

La branche orientale de cet enclos est par ailleurs doublée, dans son espace interne, par deux courts fossés, séparés d’une interruption de 4 m décalée par rapport à celle de l’enclos. Cette interruption semble elle aussi soulignée par deux imposants creusements localisés à 10 m à l’est, suggérant un accès aménagé qui ne serait pas contemporain de celui de l’enclos trapézoïdal.

Le troisième enclos

Un troisième enclos, curviligne, se distingue dans la partie nord-est de l’emprise, dessiné par un fossé plus étroit, de 0,60 à 1 m de largeur pour 0,50 m de profondeur moyenne. Il vient prendre appui à la fois sur l’enclos trapézoïdal et sur le système d’entrée de l’enclos externe et enserre ainsi un espace au sein duquel se concentrent une majorité des faits ponctuels (fosses, trous de poteau…) repérés.

Les bâtiments

Au sein des faits ponctuels, au moins 25 plans de bâtiments ont été identifiés sur l’ensemble de l’emprise. Les plus petits, de quelques mètres carrés, correspondent vraisemblablement à des greniers sur poteaux. D’autres bâtiments sur quatre poteaux porteurs, de plus grandes dimensions (autour de 20 m²), peuvent correspondre à des annexes agricoles (granges, étables…) ou des habitations. Au moins trois bâtiments à parois rejetées sont avérés : deux d’entre eux sont relativement isolés, localisés dans l’angle nord-ouest et sud-ouest de l’enclos trapézoïdal, et sont dotés de deux accès, à l’est et à l’ouest (fig. 6). D’une superficie restituable de respectivement 60 et 70 m², ils pourraient correspondre aux habitations principales. Signalons également la reconnaissance d’au moins un – voire deux – bâtiment(s) sur tranchée de fondation, montrant la variabilité des architectures mises en œuvre sur le site.

Fig. 6 : Vue d’ensemble du bâtiment à parois rejetées localisé dans l’angle sud-ouest de l’enclos trapézoïdal. Crédit : Éveha, 2021.

Le mobilier archéologique et les activités observées

Le mobilier recueilli dans l’ensemble des faits se compose en large majorité de restes céramiques, parmi lesquels une proportion non négligeable d’amphores. En l’état des observations, ces éléments permettent une attribution de l’occupation dans une fourchette comprise entre le 2e et la première moitié du 1er s. avant notre ère. Si les recoupements stratigraphiques (autrement dit la superposition de structures de différentes périodes) sont peu nombreux, le décalage des systèmes d’entrée des enclos et surtout la superposition de plusieurs plans de bâtiments indique l’existence d’au moins deux grandes phases d’occupation.

L’acidité du substrat a malheureusement entraîné la forte altération voire la disparition des restes osseux, nous privant de données précieuses sur la consommation carnée des habitants et d’éventuelles pratiques d’élevage. Parmi les autres activités pratiquées sur le site, les nombreux culots de forge attestent d’une activité sidérurgique soutenue qui a pu contribuer à la richesse de l’établissement, dont le statut des occupants pourra être discuté. En outre, quelques témoins ténus suggèrent également une activité de tissage (peson, fusaïole).

Les études du mobilier ainsi que des données récoltées se poursuivent actuellement et permettront d’affiner nos connaissances de ce site et de son occupation.