VENDÔME (41) – La Taphorie

Les fouilles menées sur le site de Vendôme au lieu-dit la Taphorie ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité de Marion Bouchet. Elles interviennent dans le cadre du projet d’aménagement de la Communauté d’agglomération Territoires Vendômois pour le projet de la ZAC du Parc Technologique de Bois de l’Oratoire (phase 2). Les investigations archéologiques ont permis de mettre au jour, sur une emprise d’environ 9 300 m², une portion d’un établissement rural datant de l’époque laténienne (fin du 2d âge du Fer, env. -150 à 25 av. J.C.).

Un enclos fossoyé

Cette occupation gauloise se caractérise par un enclos fossoyé enserrant plusieurs bâtiments sur poteaux et implanté en bordure d’un plateau surplombant, au nord, la vallée du Loir. L’enclos, de plan quadrangulaire, a pu être observé au sein de l’emprise de fouille sur une surface de plus de 6000 m², mettant en lumière son angle nord-ouest et une large partie de son aire interne (Fig. 1). Le fossé formant la limite ouest de l’enclos mesure 38 m de long et semble s’interrompre juste avant la berme ouest, ce qui laisse présager l’existence d’une interruption à ce niveau (système d’entrée ?). La continuité du segment nord de l’enclos ne peut être assurée en raison du décroché opéré à cet endroit par l’actuelle rue de Salamanque, qui en masque la partie centrale. On peut néanmoins lui restituer une longueur minimale de 131 m, se poursuivant vers l’est au-delà de l’emprise fouillée. D’après les éléments du diagnostic, il faut cependant envisager un retour correspondant au côté est de l’enclos sous le chemin rural actuel bordant directement l’emprise fouillée à l’est. La limite sud de l’enclos est, quant à elle, à rechercher plus au sud, hors emprise. Les dynamiques de comblement des trois fossés mis au jour sont globalement similaires. Ils évoquent des comblements d’origine naturelle liés à l’érosion des fossés et des traces de curage (Fig. 2 et 3). Le mobilier recueilli est particulièrement indigent et se concentre sur les tronçons ouest et nord-ouest de l’enclos. Dans le même secteur, des rejets charbonneux et cendreux ont été observés en surface du fossé, mais ils n’ont pas livré davantage de mobilier.

Fig. 1 : Vue aérienne du site en cours de fouille. Crédit : Fabrice Bodereau, Cine@Drone, 2022.
Fig. 2 : Vue en coupe d’un fossé. Crédit : Éveha, 2022.
Fig. 3 : Vue en coupe d’un autre fossé. Crédit : Éveha, 2022.

Des bâtiments au sein de l’enclos

Plusieurs ensembles de trous de poteau sont attestés dans l’aire interne de l’enclos, permettant d’identifier au moins deux bâtiments distants de 40 m l’un de l’autre. Le premier repose sur 4 poteaux porteurs puissamment fondés (fosses d’implantation de plan quadrangulaire et d’environ 1 m de côté pour une profondeur conservée moyenne de 0,35 m), circonscrivant une aire d’environ 48 m². L’espacement important entre les poteaux (6 × 8 m environ) laisse supposer l’existence de poteaux intermédiaires moins profondément ancrés et non conservés. La présence de mobilier domestique (vaisselle en céramique, une fibule en alliage cuivreux) dans les comblements d’abandon des poteaux et la recherche des comparaisons architecturales régionales pour ce type de module permettra d’alimenter la réflexion sur la fonction de cet ensemble (habitat ?). Le second bâtiment se compose également de 4 poteaux porteurs dont les fosses d’implantation disposent d’un plan quadrangulaire d’environ 1 m de côté (Fig. 4). Sa superficie plus réduite de 13 m² et l’absence de mobilier permettent de proposer l’hypothèse d’un grenier pour cet ensemble fonctionnel. Enfin, un dernier ensemble est composé de deux trous de poteau de plan circulaire (diamètre de 0,80 m, profondeur 0,30 m) et espacés de 0,75 m l’un de l’autre. Si aucun plan précis ne peut être restitué, ces deux poteaux permettent d’envisager la présence d’un troisième bâtiment qui n’est que partiellement conservé en raison de l’arasement important du site.

Fig. 4 : Vue zénithale d’un bâtiment. Crédit : Éveha, 2022.

Des anomalies naturelles

Enfin, un grand nombre des anomalies enregistrées lors de la phase de décapage s’est révélé correspondre à des anomalies naturelles, des empreintes racinaires ou des chablis. Quelques-unes semblent toutefois correspondre à de véritables creusements anthropiques, mais présentent pour la plupart des comblements stériles, avec parfois quelques charbons et généralement peu ou pas de mobilier archéologique, à l’exception de deux fosses dont l’une à livré de nombreux éléments de terre crue rubéfiée et l’autre de la céramique et des silex taillés. Pour palier à ce manque de mobilier, des prélèvements de charbons ont été effectués dans de nombreuses structures, dans le but de réaliser des datations radiocarbones qui pourront préciser la chronologie des occupations. L’absence de fosse ayant servi de dépotoir et la faible quantité de mobilier prélevée dans les fossés – qui ont été curés intégralement – indiquent que ce secteur de l’enclos était probablement destiné davantage aux activités agro-pastorales que domestiques. Le secteur d’habitat pourrait être à rechercher plus au sud, hors emprise.

Pour conclure…

Après l’abandon de cet établissement rural à une période dont la chronologie précise reste à définir (La Tène D ?, vers -150 à -25 av. J.-C.), aucune trace d’occupation durant les époques antique et médiévale n’a été mise en évidence au sein de l’emprise fouillée. Plusieurs fosses de nature indéterminée ont cependant livré quelques éléments récents (tuiles plates, céramiques, monnaie) permettant de les rattacher aux périodes modernes ou contemporaines. De même, un fossé, traversant l’emprise d’est en ouest selon une orientation globalement similaire à l’enclos protohistorique, et envisagé à l’étape du diagnostic comme un possible fossé de partition interne à l’enclos, doit en réalité être rattaché à une occupation plus tardive (médiévale ou moderne) d’après les éléments recueillis à la fouille (stratigraphie, présence mobilier moderne/contemporain dans son comblement).

Enfin, des perturbations très récentes, liées assurément aux travaux de voiries (création du rond-point et de la rue de Salamanque) et d’aménagements récents de la zone d’activités ont été observées à divers endroits de l’emprise fouillée, en particulier sur une large bande en limite nord de l’emprise le long de la rue de Salamanque.

Les études du mobilier ainsi que des données récoltées se poursuivent actuellement et permettront d’affiner nos connaissances de ce site et de son occupation.