TOULOUSE (31) – Parking cité administrative – Duportal

L’Université de Toulouse Capitole souhaitant se doter d’un nouveau bâtiment afin d’accueillir des installations sportives, le service de la médecine étudiante et du travail ainsi que des espaces d’enseignement à l’emplacement de l’ancien parking de la Cité Administrative, une prescription de fouille archéologique a été établie par le Service Régional de l’Archéologie en amont des travaux. Les fouilles menées sur le site ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité de Xavier Lhermite. Cette opération avait pour objectif de préciser la nature et la chronologie de l’occupation de ce secteur de la ville de Toulouse.

Contexte de la fouille

D’après les données du diagnostic, trois problématiques se dégageaient autour desquelles il fallait orienter plus particulièrement les recherches. Il s’agissait, tout d’abord, de l’étude du quartier médiéval et de son développement du 14e au 16e siècle. Il convenait, par la suite, de réaliser l’étude du jardin du couvent des Chartreux. Les religieux établis à la fin du 16e siècle, un peu au sud du site, acquirent en effet l’ensemble des parcelles du quartier pour aménager un grand jardin dans la première moitié du 17e siècle. Enfin, une attention particulière devait être portée à la période contemporaine car, dès la Révolution, l’ancien couvent devint un arsenal, des bâtiments industriels étant progressivement construits à l’emplacement des jardins. Fermée au milieu du 20e siècle, l’usine fut détruite pour laisser place, à partir des années 1960, à l’endroit de la fouille, au parking de la Cité administrative.

L’opération archéologique, menée du 4 janvier au 20 mai 2022, a ainsi révélé une densité de vestiges archéologiques plus importante que prévue.

Vue de la fouille, maisons situées à l’est de la voie. Crédit : Éveha, 2022.

Plusieurs phases de remblayage

L’étude archéologique a permis de mettre en évidence plusieurs campagnes visant à aplanir le terrain. En effet, le substrat présentait de nombreuses irrégularités, notamment en partie ouest où une importante dépression naturelle était comblée par d’anciens remblais. L’ensemble du site semble avoir connu une phase de nivellement en amont de la création du quartier médiéval au 14e siècle. Cet aplanissement du terrain fut encore poursuivi lors de la création du jardin des Chartreux et des aménagements liés à l’Arsenal donnant au site un caractère plan qui n’existait pas à l’origine.

Une tour du rempart

La fouille était bordée à l’ouest par l’enceinte du 16e siècle toujours conservée – bien que très restaurée – le long du boulevard Duportal. Les recherches ont révélé, sous cette enceinte, la présence d’une construction quadrangulaire soignée, profondément fondée dans le sol, dans laquelle il convient de reconnaître une tour d’un état ancien du rempart (13e s.? – 14e s.?).
Cette tour a connu deux états. Arasée en partie, son entrée fut modifiée et ces murs furent creusés de nombreux trous dans lesquels il faut vraisemblablement reconnaître des boulins destinés à servir de logement à des pigeons transformant cet ancienne
tour du rempart en pigeonnier.

Vue intérieure de la tour à l’arrière plan la noria. Crédit : Éveha, 2022.

Un quartier urbain

Protégé par ce rempart, fut aménagé un nouveau quartier. Les habitations étaient disposées, à une certaine distance à l’est du rempart, de part et d’autre d’une voie d’axe sud-sud-ouest – nord-nord-est large de 6 mètres environ. Cette voie, dont la bande de roulement était faite en calade, connut plusieurs réfections. Six unités d’habitations au moins prenaient place de chaque côté de la voie. La plupart des maisons mises au jour présentaient plusieurs états avec une reconstruction des murs et une réfection des sols. Ces maisons s’organisaient principalement selon un schéma en trois ensembles. Une pièce soignée, présentant un sol en terres cuites architecturales et des éléments de confort comme une cheminée, ouvrait sur la rue. À l’arrière de cette salle se dressait un deuxième espace, possédant un sol en calade et correspondant à un espace annexe dans lequel il faut sans doute plus reconnaître un atelier ou une grange plutôt qu’une cour. Enfin, au fond de la parcelle, un espace de jardin était occupé par différentes structures : silos, fosses ayant servi de dépotoir et puits. Au sein de ces espaces de jardin, un four domestique a été mis au jour. Il pourrait être une des structures les plus anciennes. Le grand nombre de puits au sein de certains jardins suggère une durée d’utilisation limitée pour ces structures nécessitant le creusement de nouveaux puits après quelques décennies. À noter qu’une des maisons présentait une vaste cave. Seule une fosse de latrines fut mise au jour dans l’angle sud-est du site.
Une noria fut découverte dans l’espace situé entre le quartier et le rempart de la ville. Il pourrait s’agir d’un aménagement ancien ce que les études à venir devraient permettre de préciser.

Vue zénithale de plusieurs maisons. Crédit : Éveha, 2022.

Des jardins

Des niveaux d’abandon du quartier et d’apport de remblais destinés à aménager le jardin des Chartreux ont été mis au jour. Si le travail de destruction systématique des bâtiments du quartier et l’apport de terre en vue de l’aplanissement ont bien été perçus, le seul aménagement notable de ces jardins mis au jour lors de l’opération est un important mur nord-sud limitant cet espace de la voie longeant le rempart.
Après la Révolution, le site fut pendant une partie du 19e siècle occupé par les jardins de l’Arsenal. Au sein de ces jardins, un chemin fait en calade a été mis au jour. De nombreuses fosses de plantation témoignaient de la création d’allées d’arbres au sein de ces jardins et en bordure des bâtiments mis en place à cet emplacement à partir du milieu du 19e siècle.

L’arsenal

Au sud de l’emprise, l’extrémité nord d’un ensemble de bâtiments a révélé différents états d’une unité de production montrant d’anciennes cuves et caniveaux, et ayant livré du mobilier témoignant des premières étapes de fabrication des douilles de petit calibre : flan, étampé, étiré. Sur la plus grande partie du site fut mis au jour un vaste bâtiment construit au milieu du 19e siècle contre lequel se développait une vaste halle établie là à la fin du même siècle. Si le bâtiment semble toujours avoir servi de lieu de stockage, la halle devint un lieu de fabrication pour les douilles notamment celles du canon de 75 lors de la première Guerre mondiale. Des emplacements de machine-outil associés à de nombreux caniveaux et à un ensemble de rails pour wagonnets ont ainsi été mis au jour et offrent un témoignage précieux de cette activité industrielle.

Vue zénithale d’une partie des vestiges de l’Arsenal. Crédit : Éveha, 2022.

Les études du mobilier ainsi que des données récoltées se poursuivent actuellement et permettront d’affiner nos connaissances de ce site et de son occupation.