Les fouilles archéologiques menées sur le site de Sorde-l’Abbaye (40) – Abbaye des Bénédictins Saint-Jean-Baptiste ont été réalisées sous la responsabilité de Boris Hollemaert dans le cadre du projet d’aménagement porté par la communauté de communes du Pays d’Orthe et Arrigans. Les investigations archéologiques ont permis d’étudier des vestiges datés du Moyen Âge et de l’Époque moderne.
Problématiques scientifiques
La communauté de communes du Pays d’Orthe et Arrigans avait prévu des travaux pour consolider, protéger de l’eau et restaurer le « cryptoportique » et les caves de l’abbaye de Sorde. Ces travaux concernaient la façade extérieure le long du gave d’Oloron et les murs intérieurs de l’abbaye. En conséquence, le Service régional de l’archéologie a ordonné une nouvelle fouille archéologique. Les précédentes recherches avaient permis de commencer à répertorier les archives, tant textuelles qu’iconographiques. Cependant, la conservation des données dans différents endroits rendait le processus fastidieux. Ce projet devait permettre de compléter cette récolte, notamment dans les archives des Époques moderne et contemporaine, qui étaient moins bien recensées. En raison de sa proximité avec une rivière, l’abbaye a dû s’adapter au terrain vallonné. Mais ces changements étaient peu documentés. Avec les travaux de terrassement prévus, il était nécessaire de comprendre l’ampleur et l’organisation de ces terrasses. La fouille a cherché à comprendre comment les bâtiments ont été construits sur ces terrains. À l’intérieur de l’église, l’étude des murs devait permettre de mieux comprendre leur construction. Il est rare de trouver des « cryptoportiques » de l’époque moderne en France. Les fouilles ont permis de mieux comprendre leur fonction, les « cryptoportiques » étant supposément utilisés comme entrepôts pour des marchandises transportées par bateau. Globalement, l’objectif était d’analyser l’ensemble de la zone prescrite de manière objective, sans préjugés, afin de comprendre son évolution au fil du temps.
Contextes géographique et historique
La mise hors d’eau de la terrasse sud et la réfection des « cryptoportiques » de l’Abbaye Saint-Jean-Baptiste ont motivé la prescription d’une opération comportant une étude documentaire préalable, un suivi de travaux des terrassements et une étude de bâti des salles enterrées. L’ensemble des observations a été réalisé en neuf interventions réparties entre le mois de novembre 2021 et le mois de mars 2023. L’abbatiale située sur la rive droite du gave d’Oloron, en amont de sa confluence avec le gave de Pau, s’implante sur une rive aménagée dès l’Antiquité. L’origine de la fondation des premiers bâtiments chrétiens reste discutée et pourrait intervenir à la fin du Xe siècle. Dans le courant du Moyen Âge, l’abbaye tient un rôle de contrôle du gave d’Oloron et constitue une étape de pèlerinage du chemin de Tours à Saint-Jacques-de-Compostelle. Malgré les conflits franco-anglais, l’abbaye et le bourg croissent à l’époque médiévale en se dotant notamment d’une enceinte. Mais les troubles religieux de la seconde moitié du XVIe siècle marquent une dégradation du complexe abbatial avec la destruction d’une partie des bâtiments et des archives qui y étaient conservées. C’est à la fin du XVIIe siècle qu’une nouvelle dynamique émerge sous l’égide des bénédictins de Saint-Maur qui engagent une reconstruction des bâtiments conventuels, notamment de l’ensemble des salles enterrées dites « cryptoportiques » donnant sur le gave.
Mises en œuvre architecturales
Les vestiges mis en évidence lors de la première intervention nous ont principalement renseignés sur le mode de construction des espaces enterrés, révélant une homogénéité dans la mise en œuvre des voûtes sur l’ensemble de la terrasse, avec une gestion des eaux de ruissellement remarquable et unique dans l’état de nos connaissances. Chaque extrados est doublé dès sa construction d’une couverture de tuiles canal (courant-couvert). L’eau est évacuée soit par des trous d’exhaure (évacuation) situés en haut du mur de terrasse, soit par un système de canalisation en terre cuite réservée dans les murs porteurs donnant sur un second niveau d’exhaure au pied de la terrasse. Les salles et l’embarcadère relèvent d’une même mise en œuvre entreprise entre l’extrême fin du XVIIe siècle et le milieu du XVIIIe siècle au plus tard. Si la majorité des vestiges appartiennent au XVIIIe siècle, le sondage 4 de la salle 8 a livré trois puissantes maçonneries que l’on peut associer aux vestiges des bâtiments figurés sur le plan de 1678. Sur la terrasse, au contact de l’accès, deux maçonneries antérieures aux salles ont été repérées, leurs datations restant incertaines. Sur une grande partie centrale, le mur nord, fermant les salles, est constitué de vestiges médiévaux ou modernes sans qu’il soit possible dans le détail d’en caractériser les phasages. Enfin, une série d’aménagements fonctionnels, citernes, pavillons, systèmes de pompe à eau et structures horticoles ont structuré l’espace de la terrasse du XVIIIe au début du XXe siècle.
Études et post-fouille
Le travail d’analyse des maçonneries reste à poursuivre, ainsi que la confrontation avec les sources historiques. Les développements de ces recherches permettront une meilleure caractérisation des vestiges afin de répondre, peut-être, à la double question de la fonctionnalité de ces espaces et de leur articulation avec le bâti connexe.