SORIGNY (37) – Zone d’activité Isoparc

Les fouilles archéologiques menées sur le site de Sorigny (37)  –  Zone d’activité Isoparc – Netilly/La Bellessière ont été réalisées par le bureau d’études Éveha sous la responsabilité de  Cyrille Ben Kaddour dans le cadre du projet d’aménagement porté par Communauté de communes Touraine Vallée de l’Indre. Les investigations archéologiques ont permis de caractériser une occupation humaine datée de la Tène moyenne et finale (-400 av. n. e. à -25 av. n. e.), un établissement rural antique (1er s. av. n. e. au 4e s. de n. e.) et une nécropole du haut Moyen Âge (5e s. au 9e s). D’autres vestiges mis au jour lors de cette fouille sont datables du bas Moyen-Âge et de l’époque moderne.

Une première occupation gauloise

Les vestiges les plus anciens remonteraient au second âge du Fer (la Tène moyenne, -400 av. n. e. à -250 av. n. e.) et correspondraient à des bâtiments sur poteaux aux plans difficilement restituables sur le terrain et peut-être à quelques fosses. L’occupation perdure à la Tène finale (-250 av. n. e. à -25 av. n. e), toujours représentée par des ensembles de trous de poteaux et fosses disséminés sur une assez grande partie de l’emprise de fouille, a priori sans limites fossoyées. Un profond fossé en « V », avec une interruption comportant des aménagements se situe à l’extrémité est de la fouille. Il s’agit probablement de la façade monumentalisée d’un habitat, dont les autres côtés n’ont pas bénéficié de fossés pour délimiter cet espace. Sa datation reste incertaine, mais semble bien laténienne. Quelques éléments de céramique ont pu être prélevés dans son comblement supérieur, ainsi qu’un torque ternaire* en alliage cuivreux (Fig. 1).

*ternaire : qui présente trois éléments, ici des décors.

Fig. 1 : Radiographie du torque en alliage cuivreux laténien. Crédit : Charlotte Rerolle, 2024

Une villa s’implante sur l’établissement gaulois

À l’ouest de l’emprise, se superposant à des constructions, des fosses et des puits ou des puisards laténiens, un vaste habitat avec bâtiments sur fondations en pierre est créé au Haut-Empire. Celui-ci peut-être considéré comme la pars urbana d’une villa (Fig. 2), correspondant à la partie résidentielle de l’établissement. Presque intégralement observée, celle-ci a connu au moins trois grands chantiers de construction perceptibles grâce aux recoupements et aux différentes techniques et matériaux employés. La dernière phase comporte une vaste clôture maçonnée délimitant un espace carré de cour mesurant près de 2800 m2.

Fig. 2 : Vue aérienne oblique de la pars urbana de la villa gallo-romaine. Crédit: Fabrice Bodereau, 2023.

La conservation des fondations de murs est fluctuante selon les chantiers de construction, variant de quelques centimètres (correspondant à la première assise de fondation) à plus d’1,20 m (Fig. 3). Certains murs ont été intégralement récupérés. Si la partie résidentielle de la villa est plutôt vaste et comporte des bâtiments particulièrement bien fondés, aucun élément de confort (chauffage par hypocauste, bassins d’agrément, etc.), ni aucun élément de décor (enduits peints, roches marbrières, décor sculpté…) n’y a été découvert. On note l’absence de constructions excavées destinées au stockage tels que caves et celliers.

Figure 3: Sondage manuel dans un des murs puissamment fondé de la villa antique. Crédit: Éveha, 2023.

Un puits à eau date de cette époque, un autre était peut-être plus ancien (LaTène finale ?). Ce dernier, intégralement fouillé manuellement était très peu profond et ne comportait que peu de mobilier. Le mobilier en lien avec la villa est de manière générale très peu abondant et provient presque exclusivement de niveaux de remblais de cailloutis ou de sols extérieurs, notamment dans la moitié nord de la cour. Dans les bâtiments, aucun niveau de sol n’est conservé. Parmi le mobilier notable, citons quelques fibules en alliage cuivreux, quelques outils en fer et quatre monnaies en argent frappées à Rome à l’époque républicaine. L’espace de cette occupation antique et ses proches abords ont été particulièrement impactés par des chablis dont la datation reste incertaine.

Une nécropole alto-médiévale s’implante sur un espace funéraire antique

À 200 m à l’est de la pars urbana de la villa, existent deux enclos maçonnés de forme carrée et mesurant chacun 260 m2. L’un d’entre eux était vide de vestiges, l’autre comporte quelques éléments potentiellement liés à des restes de crémation (esquilles osseuses et céramiques avec traces de chauffe). Ce dernier, dont le caractère cultuel (fanum ?) ou funéraire est supposé pour la période gallo-romaine a, en tout cas, polarisé des inhumations à la période alto-médiévale (Fig. 4). Une centaine de tombes ont en effet étaient documentées dans l’enclos ou dans sa très proche périphérie. Généralement très mal conservées (faible enfouissement et ossements humains friables et fragmentaires), elles comportent régulièrement des aménagements rudimentaires (calages de pierre autour de coffres en bois) mais ne contiennent qu’en de très rares occasions, des dépôts de mobilier funéraire (essentiellement des perles en verre). Quatre datations radiocarbones entreprises lors de l’opération de diagnostic permettent d’entrevoir un fonctionnement de cette nécropole entre le VIIe et les IXe/Xe siècles. La mauvaise conservation des sépultures laisse envisager qu’une partie non négligeable de la population inhumée a été complètement oblitérée par l’arasement du site, notamment suite aux travaux agricoles postérieurs au haut Moyen Âge.

Fig. 4 : Exemple de sépulture du haut Moyen Âge relativement bien conservée. Crédit : Éveha, 2023

Parcellaire médiéval et moderne

Le tiers oriental de la fouille comporte d’assez nombreux aménagements datant de la fin du Moyen Âge et de l’époque Moderne (voire contemporaine) en lien avec la ferme de « Netilly » qui apparaît sur le cadastre dit napoléonien et est connue dans les textes à partir du XVIIIe siècle. Il s’agit de fossés parcellaires, de chemins matérialisés par des ornières ou de très légères surélévations du terrain, de petites fosses probablement en lien avec des plantations (arbres fruitiers, vigne ?) et de deux fosses dans lesquelles ont été inhumées de jeunes animaux d’élevage, probablement morts de maladie.

La post-fouille permettra de préciser le phasage des différentes occupations et s’attachera à documenter l’économie et l’environnement du site aux périodes protohistoriques et antiques. La mauvaise conservation des ossements humains limitera certainement l’étude biologique de la population inhumée dans la nécropole alto-médiévale.

Fig. 5 : Plan général du site toute période confondue. Crédit: Éveha, 2023